30 Janvier 2025
Le Paquet « Dessins ou Modèles » (ci-après le « Paquet »), publié le 18 novembre 2024 au Journal officiel de l’Union européenne et entré en vigueur le 8 décembre 2024, marque une étape clé dans la modernisation des règles de protection des dessins et modèles.
Osmose vous présente les points clefs
Ce Paquet comprend :
– La Directive (UE) 2024/2823 du 23 octobre 2024 qui refond la directive 98/71/CE de 1998 sur la protection juridique des dessins et modèles, ci-après la « Directive »
- Le Règlement (UE) 2024/2822 du 23 octobre 2024 qui modifie le règlement (CE) n° 6/2002 sur les dessins ou modèles communautaires et abroge le règlement (CE) n° 2246/2002 de la Commission, ci-après le « Règlement ».
Les Etats membres ont jusqu’au 9 décembre 2027 pour transposer la Directive dans leur droit national et adapter leur législation à ces nouvelles dispositions. Quant aux dispositions du Règlement, elles sont pour la plupart applicables à partir du 1er mai 2025, les autres dispositions étant applicables à partir du 1er juillet 2026.
Ce Paquet intervient dans un contexte de réforme initié par les conclusions du Conseil de l’Europe du 10 novembre 2020[1], qui avait demandé à la Commission européenne de réviser le règlement (CE) n°6/2002 et de la directive 98/71/CE. L’objectif était notamment de moderniser les systèmes de protection des dessins et modèles industriels et de les rendre plus attractifs à l’ère du numérique, notamment pour les créateurs indépendants et les PME, en simplifiant les démarches et en renforçant la compétitivité européenne.
Selon l’EUIPO, cette réforme poursuit quatre grands objectifs :
- moderniser, clarifier et renforcer la protection des dessins ou modèles ;
- améliorer l’accessibilité de cette protection dans l’UE ;
- faciliter l’interopérabilité des systèmes de protection au sein de l’UE ;
- harmoniser les régimes concernant la protection des pièces de rechange.
Au-delà des modifications terminologiques (le dessin ou modèle communautaire devient le dessin ou modèle de l’Union européenne), le Paquet introduit plusieurs changements visant à moderniser le cadre juridique des dessins et modèles (1), à s’adapter aux évolutions numériques et à rendre leur protection plus accessible (2) et attractive pour les entreprises et les créateurs (3). La protection est renforcée (4) avec une hausse des tarifs (4).
1. Modernisation et adaptation aux nouveaux usages numériques
1.1 Extension des définitions
- Dessin ou modèle:
Pour s’adapter à l’émergence de nouveaux types de dessins ou modèles non intégrés à des produits physiques, le Paquet élargit leur définition en y incluant « le mouvement, les transitions ou tout autre type d’animation de ces caractéristiques » (article 2 paragraphe 3 de la Directive et article 3, paragraphe 1 du Règlement). Ainsi, la protection s’étend désormais à l’apparence des produits numériques.
- Produit:
La définition de « produit » s’élargit pour intégrer :
- L’emballage, les ensembles d’articles, la disposition dans l’espace d’éléments destinés à former un environnement intérieur ou extérieur et les pièces conçues pour être assemblées en un produit complexe.
- Les œuvres ou symboles graphiques, les logos, les motifs superficiels, les caractères typographiques et les interfaces utilisateur graphiques.(article 2 paragraphe 4 de la Directive et 3 du Règlement)
Cet ajout reflète une volonté d’adapter la protection des dessins ou modèles à la diversité des créations modernes, qu’elles soient physiques ou numériques.
1.2 Impression 3D
La création, le téléchargement, la copie, le partage ou la distribution de support ou logiciel permettant de fabriquer un produit intégrant un dessin ou modèle protégé sont interdits (article 16 paragraphe 2, d de la Directive et article 19 paragraphe 2, d du Règlement).
Cette interdiction vise à prévenir les usages illicites des dessins ou modèles protégés, en particulier dans le contexte de l’impression 3D, et à protéger les droits des créateurs face aux nouvelles technologies de reproduction et de partage. Elle renforce ainsi la sécurité juridique et favorise une utilisation équitable des créations protégées.
1.3 Représentation des dessins ou modèles
La demande d’enregistrement doit inclure « une représentation suffisamment claire du dessin ou modèle permettant de déterminer l’objet pour lequel la protection est demandée » (article 26 de la Directive et article 18 bis du Règlement). Cependant, cette exigence de visibilité ne concerne que la demande d’enregistrement : les caractéristiques de dessin ou modèle d’un produit n’ont pas besoin d’être visibles à un moment ou dans une situation spécifique pour bénéficier de la protection (considérants 15 et 16 de la Directive). L’exigence d’une visibilité lors de l’utilisation normale ne s’applique qu’aux produits complexes.
Cette représentation peut être statique, dynamique ou animée et est réalisée par tout moyen approprié, à l’aide des technologies généralement disponibles, y compris par croquis, photographie, vidéo, imagerie informatique ou modélisation informatique (article 26 de la Directive).
Cette flexibilité en matière de représentation permet aux créateurs de déposer des dessins ou modèles sous différentes formes, en s’adaptant aux technologies et aux formats modernes, tout en garantissant une protection claire et efficace.
2. Simplification des dépôts et harmonisation
Les demandes de dépôts ont été harmonisées entre les offices nationaux et l’EUIPO et doivent désormais inclure les éléments suivants :
- Une requête en enregistrement,
- Une indication claire du demandeur,
- Une représentation précise du dessin ou modèle,
- La désignation des produits concernés par le dessin ou modèle,
- Le paiement d’une taxe.
(article 25 de la Directive et 36 du Règlement)
En ce qui concerne les dépôts multiples, il est désormais possible de soumettre une seule demande regroupant plusieurs dessins ou modèles, sans avoir à les séparer par classe, puisqu’ils peuvent désormais appartenir à des classes différentes de la classification de Locarno.
3. Droits exclusifs et nouvelles limites
3.1 Précision sur la titularité
Le Paquet apporte des clarifications concernant la titularité des droits.
En principe, le droit sur un dessin ou modèle enregistré appartient au créateur ou à son ayant droit. Si plusieurs personnes ont collaboré à la création, ce droit leur appartient conjointement.
A l’instar du droit des brevets, le Paquet introduit une disposition selon laquelle le droit sur un dessin ou modèle national enregistré revient à l’employeur lorsqu’il a été réalisé par un salarié dans l’exercice de ses fonctions ou conformément aux instructions de l’employeur.
Cependant, cette dévolution automatique au bénéfice de l’employeur est soumise à deux limites :
– la possibilité d’y déroger par une convention contraire entre les parties concernées ;
– et le respect des dispositions de la législation nationale applicable.
3.2 Introduction de deux nouvelles exceptions aux droits conférés
Les droits conférés par un dessin ou modèle ne s’exerce désormais pas à l’égard :
- D’actes accomplis afin d’identifier un produit ou d’y faire référence comme étant celui du titulaire du dessin ou modèle (cette première exception trouve son inspiration dans l’exception de référence nécessaire prévue en droit des marques),
- D’actes accomplis à des fins de commentaire, de critique ou de parodie (cette seconde exception trouve son inspiration dans les exceptions prévues au régime du droit d’auteur).
Ces exceptions ne sont invocables que si lesdits actes sont compatibles avec les pratiques commerciales loyales et ne portent pas indûment préjudice à l’exploitation normale du dessin ou modèle.
3.3 Ajout d’une clause de réparation
Il a été constaté que la protection des dessins ou des modèles pour les pièces utilisées dans la réparation de produits complexes n’était que partiellement harmonisée, entrainant une fragmentation du marché intérieur et une insécurité juridique (considérant 7 de la Directive).
Cette clause clarifie le fait qu’aucune protection ne s’applique aux dessins ou modèles qui concernent des pièces détachées utilisées uniquement pour réparer un produit complexe et lui redonner son apparence initiale.
Cette clause introduit ainsi une exclusion spécifique pour ce type de pièces :
- Celles dont l’apparence conditionne le dessin ou modèle de ladite pièce (les pièces dites « must-match »);
- Celles utilisées strictement à des fins de réparation du produit complexe.
(Article 20 bis du Règlement et article 19 de la Directive)
Toutefois, seul peut invoquer la clause de réparation le fabricant ou le vendeur d’une pièce d’un produit complexe qui a dûment informé le consommateur de l’origine du produit destiné à être utilisé aux fins de réparation, « indication permettant aux consommateurs de faire un choix en connaissance de cause entre produits concurrents pouvant être utilisés pour la réparation » (« due diligence »).
Une période transitoire est prévue jusqu’au 9 décembre 2032 pour permettre aux Etats membres de se conformer à ces nouvelles dispositions et d’intégrer cette clause dans leurs législations nationales.
3.4 Introduction de l’indication de dessin ou modèle
Une des nouveautés de ce Paquet est également l’introduction du symbole (D), conçu pour simplifier la commercialisation, en particulier pour les PME et les créateurs indépendants, des produits protégés par des dessins ou modèles. Ce symbole permet de signaler facilement l’enregistrement d’un dessin ou modèle au public. Il peut être apposé directement sur le produit ou dans sa description, accompagné d’un numéro d’enregistrement ou d’un lien vers le registre des dessins ou modèles (articles 24 de la Directive et 26 bis du Règlement).
Cette mesure vise à renforcer la visibilité et la reconnaissance des dessins ou modèles enregistrés, tout en simplifiant leur identification et leur utilisation commerciale.
En cas d’action en contrefaçon, le Paquet instaure également une présomption de validité du dessin ou modèle enregistré en faveur du titulaire de droit.
4. Renforcement de la protection et des procédures
4.1 Motifs de rejet
Le Paquet définit clairement les motifs sur lesquels les offices devront examiner les demandes (article 13 § 1 de la Directive et article 47 du Règlement) :
- Non-conformité à la définition d’un dessin ou modèle,
- Contrariété à l’ordre public et aux bonnes mœurs,
- Usage abusif d’un des éléments énumérés à l’article 6 ter de la Convention de Paris pour la protection de la propriété industrielle.
En plus, deux motifs facultatifs peuvent être appliqués par les Etats membres (article 13 §2 et 3 de la Directive) :
- Usage abusif de signes, emblèmes et armoiries non visés à l’article 6 ter de la Convention de Paris ayant un intérêt public particulier pour l’Etat membre concerné,
- Reproduction totale ou partielle d’éléments appartenant au patrimoine culturel présentant un intérêt national.
4.2 Procédure administrative de nullité
La version finale de la Directive laisse aux Etats membres la liberté de décider ou non d’instaurer une procédure administrative de nullité devant les offices nationaux, alignée sur celle en vigueur pour les marques devant l’EUIPO (article 31 de la Directive).
L’INPI prévoira une telle procédure administrative de nullité.
La directive harmonise néanmoins les motifs de nullité que les offices doivent prévoir au minimum dans le cadre de cette procédure, s’ils décident de l’instaurer :
- Non-conformité à la définition d’un dessin ou modèle
- Défaut de nouveauté
- Défaut de caractère individuel
- Fonction technique du dessin ou modèle
- Contrariété à l’ordre public et aux bonnes mœurs
- Usage abusif d’un des éléments énumérés à l’article 6 ter de la Convention de Paris
- Conflit avec un dessin ou modèle antérieur
(Article 14 de la Directive)
Dans le cadre de cette procédure administrative, les personnes habilitées à demander la nullité pour les deux derniers motifs sont :
- La personne ou l’entité concernée par l’usage abusif en raison de la reprise d’éléments énumérés à l’article 6 ter de la Convention de Paris,
- Le demandeur ou le titulaire du droit antérieur et les personnes habilitées à exercer les droits lors d’un conflit avec un dessin ou modèle antérieur (les États membres peuvent prévoir qu’un licencié autorisé par le titulaire du droit antérieur puisse également demander la nullité sur ce motif, alors que celui-ci sera expressément habilité à le faire devant l’EUIPO).
Une procédure accélérée en matière de nullité a été introduite, permettant l’examen prioritaire des demandes lorsque le titulaire du dessin ou modèle de l’Union européenne ne conteste pas les motifs de nullité ou les demandes en question (article 53 bis du Règlement). Cette procédure accélérée vise à simplifier et accélérer le traitement des demandes de nullité, réduisant ainsi les délais et les incertitudes pour les titulaires et les parties concernées, tout en renforçant l’efficacité du système de protection des dessins et modèles au sein de l’UE.
Enfin, le Paquet a introduit la possibilité pour le titulaire d’un dessin ou modèle, d’un signe distinctif ou d’une œuvre protégée antérieure de consentir expressément, au moyen d’une lettre de consentement, à l’enregistrement d’un dessin ou modèle déposé par un demandeur. Dans ce cas, la nullité dudit dessin ou modèle enregistré ne peut être prononcée, dès lors que le titulaire antérieur avait préalablement donné son consentement exprès à cet enregistrement avant d’en solliciter la nullité (Règlement : article 25§7 – applicable à partir du 1er juillet 2026 – Directive : article 14§7).
5. Taxes et délais
5.1 Modification des taxes de renouvellement
Les taxes de renouvellement des dessins ou modèles enregistrés ont subi une hausse significative. Les nouveaux montants sont les suivants :
- Premier renouvellement : de 90 à 150 euros
- Deuxième renouvellement : de 120 à 250 euros
- Troisième renouvellement : de 150 à 400 euros
- Quatrième renouvellement : de 180 à 700 euros
(Article 50 quinquies et Annexe 1 du Règlement)
Cependant, certains montants restent inchangés :
- Taxe de dépôt d’un dessin ou modèle auprès de l’EUIPO : 350 euros
- Taxe de renouvellement pour les dessins ou modèles internationaux désignant l’Union européenne : 62 euros par dessin ou modèle pour chacun des quatre renouvellements.
5.2 Modification du délai de renouvellement
La demande de renouvellement doit désormais être présentée dans un délai de six mois précédant l’expiration de l’enregistrement (et non plus expirant le dernier jour du mois au cours duquel la période de protection prend fin) (article 32 de la Directive et 50 quinquies du Règlement).
Les équipes d’OSMOSE Avocats sont à votre disposition pour répondre à vos questions et vous accompagner dans vos projets de dessins et modèles.
[1] Sur la politique relative à la propriété intellectuelle et la révision du système de dessins et modèles industriels dans l’Union
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